n'oublions pas
Vacances, ce mot me ramène toujours à mon enfance, bizarre pour un terme récurant. Il est vrai que congés est plus d’actualité vu mon âge. Ce mot vacances, est-il directement lié à la scolarité et de ce fait à mon enfance?
Enfin, venons à ces semaines passées en famille.
Autre phénomène surprenant, est que ces jours de dilettante me ramènent toujours en un lieu, j’y viens enfin, le LAC D’ANTRE.
Un paradis où nous partions les quatre enfants à la découverte du lac, des champs, des bois, cascades ou encore de la source. Au fil du temps, nous nous les sommes appropriés, tout était à nous, à nous seuls, les quatre.
Dans cet environnement, il aurait pu arriver de multiples accidents. Pourtant, aucun aller retour au service des urgences d’un hôpital n’a été déclaré, hormis une appendicite aigüe déclenchée la veille de mon anniversaire.
Anniversaire, aussi directement lié aux vacances pour ma part.
Des cadeaux qui me permettaient de grandir et surtout de devenir pour des après midi entières un fabuleux metteur en scène. Arcs, arbalètes, cerf-volants et ce magnifique poignard offert par papa que je portais fièrement à la ceinture, étaient de magnifiques accessoires de réalisateur.
Même si ces jours passés au rythme des leçons de cahier de vacances, celles-ci terminées, on s’évadait à nos loisirs. Lorsque je n’étais pas accaparé à observer une fourmilière ou encore à vouloir débusquer une taupe de son trou, c’est avec mon frère Paul que je passais la plupart de mon temps à la pêche.
Nous n'avions plus les vieilles cannes de bambou trop sèches et rafistolées, mais, chacun une magnifique canne en fibre de verre télescopique de 3 m. Une fierté d’avoir réussi à convaincre ma mère de nous acheter ces objets chers, à Moirant.
Pour les appâts, nous partions nous mouiller les pieds et glacer les mains dans le ruisseau, au niveau de la source. Soulevant les pierres, nous ramassions les plus beaux « charrie bois ». Petites larves cachées dans une coquille tubulaire construite d’un congloméra de petites brindilles de bois ou de petits graviers. Ces larves de Phrygane sont une gourmandise irrésistible pour certains poissons.
Lors d’une grosse pluie d’été, le courant entraîna toute cette petite faune. Maman nous voyant malheureux à l’idée de plus trouver d’esches pour pêcher, nous affirma que les sauterelles feraient l’affaire. Nous passâmes des après midi entières Paul et moi à les attraper. Pour les trouver, nous marchions dans les hautes herbes non fauchées afin de les voir décoller, dans le but de les repérer grâce à leurs éventails orange déployés par leurs ailes. Une chasse frénétique à l’idée qu’on puisse retourner à notre activité munis de nos superbes cannes que l’on trouvait déjà trop courtes.
Les sauterelles, très moyen. C’est un ami de la famille, JP Bouillet que je salue, qui nous livra un secret pour récupérer facilement des vers de terre.
Une planche de bois posée sur un sol terreux, bien arrosé, attendre le lendemain ; c’est un miracle, levez la planche, cueillez.
Je crois bien que les jours qui suivirent cette découverte, furent un succès avec un record de trente cinq perchettes prisent aux barques des Brocheau.
Le maniement de la canne, l’eschage, les nœuds, l’approche du plan d’eau m'ont été montrés par un homme, Marcel. Il portait sur lui sept fois mon âge quand il me fit partager ses connaissances. Marcel parlait peu, je l’observais, il me regardait, j’ai appris. Il avait cette chose qui fait que l’on se sent bien. Des gestes qui vous disent tout. Je crois que ces jours passés avec lui, je ne retiendrais qu'une seule phrase par laquelle commença notre aventure humaine :
-Tout ce que je te demande, c’est de ne pas tomber à l’eau, je nage comme une tenaille.
Pour moi l’enseignement est un échange de connaissances dans le respect de l’un et l’autre. Marcel était un excellent observateur, un excellent professeur.
Mes sœurs plus âgées, étaient trop occupées à se regarder pour partager nos activités. C’est vrai qu’elles étaient la curiosité des garçons de Villard, village le plus proche. Ils montaient les voir en cyclo, une bande sympathique. Elle était composée du cascadeur « le Cam », les musiciens les frères Rossi, Gérard dit Dédé, grand et costaud et « Poche », celui qui suit les bandes.
De temps en temps, elles participaient à nos jeux, les trouvant sûrement infantile.
Je me souviens d’un après midi, caché sous les arbres derrière la ferme, au-dessus du noyer, nous avions tracés des chemins dans la côte de la roche. Des sentiers plus ou moins raides.
Agnès les baptisa rapidement piste noire rouge et bleues.
Nous pratiquions le ski, ici, ce plein après midi de juillet.
Légèrement fléchis sur nos pieds, de vieilles branches de noisetier dans les mains en guise de bâton, on dévalait les pentes sur cette terre noire chargée d’humus. Odile avait du style. C’était rare de partager avec nos sœurs des moments comme celui-ci.
Agnès et Odile préféraient descendre plus bas dans la vallée, là où les moteurs de moto vrombissaient. Tino, un des frères ROSSI, et Dédé, étaient les heureux élus. Un secret de polichinelle qu’il fallait garder.
Chaque année nous avions droit tous ensemble, à la sortie jusqu’au grand chêne, celle de la Raja ou encore, la ferme du Fernand où Maman s’appliquait à chaque fois à remettre en fonction une source. Un filet d’eau sortant d’une butte, canalisé par un vieux tronc d’arbre creusé. Ce n’étaient pas mes ballades préférées, les adultes nous accompagnaient, le plaisir de la découverte n’avait plus la même magie. Lors de ces promenades, ma grand-mère, Mamie, nous accompagnait chaussée de ses fameuses Méphisto. A son bras, elle portait toujours des petits seaux emboîtés l’un dans l’autre. C’était l’occasion de cueillir framboises et fraises des bois pour de futures incomparables gelées.
Cette activité se pratiquait dans la cuisine au fond de la ferme, une pièce éclairée par une fenêtre plein nord.
Une fois les fruits de notre récolte déposés sur l’ancien pétrin caché d’une toile cirée à carreaux, les enfants y étaient admis avec réticence. Mamie tenait les rennes de la cuisinière à bois, pesait les fruits, le sucre cristallisé, s’activait pendant des heures. Dans des vieux torchons colorés par les réalisations des années passées, Mamie et Maman pressaient les baies. Quelle odeur. Les jus extraits remplissaient les pots de verre d’une couleur cristalline, elles enfermaient du soleil. Mamie c’était la chef de cette pièce !
A suivre....